Et si nous revisitions nos classiques ?

Le Moyen Âge

Auteur inconnu                          La Chanson de Roland

Chrétien de Troyes                    Lancelot ou le Chevalier à la charrette,
                                                 Perceval ou le Conte du Graal

Auteur inconnu                          Aucassin et Nicolette

Auteur(s) inconnu(s)                  Le Roman de Renart

Guillaume de Lorris                   Le Roman de la Rose
Jean de Meung                          est l'auteur de la seconde partie.
Jean de Meung est un penseur très hardi.
Annonce les grands écrivains du XVI e s., Rabelais et Montaigne.

Rutebeuf                                   Miracle de Théophile
Le premier en date de nos grands poètes lyriques. Annonce Villon.

Joinville                                     Histoire de saint Louis
Hagiographe.

Froissart                                   Chroniques
Excellent chroniqueur.

Commines                                Mémoires
Le confident et l'agent secret du roi de France.
Historien réfléchi et sagace.
C'est un penseur plus qu'un peintre.

Auteur inconnu                         Farce de Maître Pathelin

Charles d'Orléans                     Ballades, rondeaux

François Villon                          Lais (Petit Testament), Grand Testament,
                                                 Épitaphe Villon (Ballade des pendus)

Né de parents pauvres. Fut adopté par un ecclésiastique, Guillaume de Villon,
qui lui fit faire d'excellentes études.
Ce malfaiteur, ivrogne et joueur, est le plus grand poète du Moyen Âge.

Le XVIe siècle

Clément Marot                          Épîtres, Épigrammes, Élégies
Valet de chambre de François I er.
Gracieux poète de cour.
C'est lui qui fixa les règles de l'accord du participe passé. À la demande de François
I er.

François Rabelais                      Pantagruel, Gargantua
Rabelais répand, sous une forme accessible à tous, les idées nouvelles :
amour de l'Antiquité, humanisme, culte total de la vie, soif de savoir, tolérance.
Le style de Rabelais est d'une richesse extraordinaire.
Farceur érudit, écrivain pittoresque, parfait modèle de l'humanisme de la Renaissance,
il sut donner à la langue française des couleurs nouvelles.
Est-il le pionnier de la contrepèterie ? Certains le pensent. La fameuse "femme folle à la messe" l'a rendu en tout cas célèbre.
Les expressions suivantes sont de lui. Un "mouton de Panurge" désigne une personne qui suit un mouvement sans réfléchir. "Tout vient à point, qui peut attendre." "Rire est le propre de l'homme." "L'habit ne fait pas le moine."

 Jean Calvin                              Institution de la religion chrétienne
Écrivain sobre et net.
Penseur vigoureux.
Sa morale est nettement opposée à celle de Rabelais.

Pierre de Ronsard                    Odes, Amours, Hymnes
A su faire chanter l'alexandrin.
Le plus grand poète français avant le XIX e s.
Critiquée par Malherbe, puis oubliée, son œuvre fut réhabilitée par Sainte-Beuve.

Joachim du Bellay                    Défense et illustration de la langue française,
                                               Les Regrets

Ami et collaborateur de Ronsard.
Poète très fin et très personnel.
Son oncle, le cardinal du Bellay, fut le protecteur de Rabelais.

Michel Eyquem,                       Essais
seigneur de Montaigne        
Reçut une éducation très soignée, exclusivement en latin.
Apôtre de la tolérance. Ennemi de l'érudition.
Style très varié. Recherche le terme concret, l'image suggestive ou amusante.
Idées épicuriennes et stoïciennes, teintées de scepticisme.

Agrippa d'Aubigné                   Les Tragiques, Histoire universelle, le Printemps
Mme de Maintenon était sa petite-fille.

François de Malherbe              Odes, Psaumes, Stances, Sonnets, etc.
Épurer la langue, tel fut son grand souci.
Des idées claires, générales, accessibles à tous, une forme sobre et ferme.
Il fut un grammairien sévère.

René Descartes                       Discours de la méthode,
                                               Traité des passions,
                                               Méditations métaphysiques,
                                               Principes de la philosophie

Fit de fortes études au fameux collège de La Flèche, tenu par les jésuites.
Rationaliste. Emploie le doute méthodique.
Génie universel : mathématicien, physicien, physiologiste.
A renouvelé toute la philosophie.
Descartes est un penseur : il ne cherche que la clarté.

Le XVIIe siècle

Pierre Corneille                        
Surtout connu pour ses tragédies : Le Cid, Horace, Cinna, Polyeucte, la Mort de Pompée, Œdipe, Attila, etc.
Comédies : le Menteur, la Suite du Menteur.
La tragi-comédie du Cid le rend célèbre.
Il vit, à la fin de sa carrière littéraire, le public lui préférer Racine.
Il mourut pauvre et oublié.

François VI, duc de la Rochefoucauld
Réflexions ou Sentences et Maximes morales.
Il fréquente le salon de Mme de La Fayette.
Pour lui, l'accomplissement du devoir ne donne nullement le bonheur.
Fort ambitieux, il conspira contre Richelieu, puis contre Mazarin lors de la Fronde.

Il appartient à l'une des plus anciennes familles de France.

Jean de La Fontaine                Contes, Fables
Fils d'un maître des Eaux et Forêts.
Ses protecteurs lui assurent le gîte et le couvert.
Poète épicurien et artiste fort dilettante.
Richesse et saveur pittoresque de sa langue.
Il hausse la fable à la dignité du vrai poème.

Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière
Ses principales comédies : les Précieuses ridicules, l'École des femmes, le Tartuffe, le Misanthrope, le Médecin malgré lui, l'Avare, le Bourgeois gentilhomme, les Fourberies de Scapin, les Femmes savantes, le Malade imaginaire, etc.
Reçut une éducation soignée dans une institution dirigée par les jésuites.
Fit des études de droit.
Il fonda l'Illustre Théâtre, mais ne réussit qu'à s'endetter.
Il a l'honneur de jouer devant le roi Louis XIV, qui goûte sa verve comique et lui accorde la jouissance de la salle du Petit Bourbon, avec le titre de Troupe de Monsieur.
De santé fragile, il meurt à la tâche.
Sa vie intime fut triste.
Il eut à soutenir de rudes attaques, mais il trouva un appui solide chez Boileau, qui reconnut vite son bon sens et sa sagesse.
La morale de l'œuvre de Molière : elle ressemble à celle de La Fontaine, pratique et humaine, teintée d'épicurisme. L'égoïsme : voilà ce qu'il pourfend surtout.

Blaise Pascal                        Provinciales, Pensées
Mathématicien, physicien, philosophe, écrivain.
La doctrine austère des jansénistes l'attire beaucoup.
Les Provinciales : une diatribe contre les jésuites.
Mais le chef-d'œuvre de Pascal, ce sont les Pensées.
Comme scientifique, il vérifie expérimentalement les travaux de Torricelli sur la pression atmosphérique.
Il invente aussi une machine à calculer.
Il est également, avec Pierre de Fermat, à l'origine du calcul des probabilités.
À mentionner entre autres : ses travaux sur la géométrie, l'équilibre des liquides et la pesanteur de l'air.
Après une nuit d'extase, il se retire à Port-Royal.
Pour lui, Dieu se révèle au cœur, non à l'esprit.
Il meurt à trente-neuf ans.

Marie de Rabutin-Chantal, marquise de Sévigné              Lettres
Veuve à vingt-cinq ans, elle se consacre à ses enfants, Françoise et Charles.
Sa fille épouse le comte de Grignan. Comme celui-ci est nommé lieutenant général en Provence, il appelle tout naturellement sa femme auprès de lui.
La séparation de la fille d'avec sa mère engendre le chef-d'œuvre de la littérature épistolaire. Cette correspondance va durer un quart de siècle.

Jacques-Bénigne Bossuet                          Sermons, Oraisons funèbres
Évêque. Surnommé : l'Aigle de Meaux.
Orateur religieux le plus réputé.
Précepteur du Dauphin, qui était paresseux et peu doué.
Il fut pour le siècle de Louis XIV, dans l'ordre religieux, ce que fut Boileau dans l'ordre littéraire.
Son grand dessein : maintenir inébranlable l'autorité du dogme. D'où sa lutte acharnée contre le quiétisme.
Ce grand écrivain classique a été un orateur, un polémiste, un historien.

Madame de La Fayette                             La Princesse de Clèves
(Marie-Madeleine Pioche de La Vergne,
comtesse de La Fayette ou Lafayette)
Elle a inauguré l'ère du roman psychologique moderne.
Grande amie de Mme de Sévigné et du duc de La Rochefoucauld.
Ce dernier se lia avec elle d'une amitié profonde, qui dura jusqu'à sa mort.

Nicolas Boileau                                         Art poétique
Chef du parti favorable aux Anciens dans la querelle des Anciens et des Modernes.
Très lettré, bon grammairien, bon helléniste.
Très lié à Molière, Racine, La Fontaine.
Très apprécié par Louis XIV dont il devint l'historiographe (avec Racine).
Sa vieillesse fut mélancolique.

Jean Racine               Tragédies : Andromaque, Britannicus, Phèdre, etc.
                                 Comédie : Les Plaideurs
Orphelin de bonne heure (dès l'âge de quatre ans).
Acheva ses études à Port-Royal où sa tante était religieuse.
Quand il revient à Paris, il se lie avec La Fontaine, Boileau et Molière.
Il mène une vie assez dissipée.
C'est le succès de la tragédie Andromaque qui assure sa réputation (comme, jadis, le Cid de Corneille).
Ulcéré par l'échec relatif de Phèdre, il renonce brusquement au théâtre. Janséniste, il vécut cette partie difficile de sa vie dans la retraite, fort chrétiennement. Il revint au théâtre sur la demande expresse de Mme de Maintenon douze ans plus tard.
Si Corneille reste le grand peintre de la volonté humaine, Racine est celui des passions.
Racine est la plus parfaite incarnation du classicisme
De caractère passionné et susceptible, fort nerveux.
Il s'est brouillé avec Molière.
L'amitié de Boileau le console de tout : les cabales furent légion.
Historiographe du roi.
Il mourut dans une demi-disgrâce.

Jean de La Bruyère            Les Caractères
Les Caractères s'attardent à dévoiler les vices et les ridicules humains.
Il y dépeint de façon fort caustique les travers des hommes de son temps.
Son style est elliptique et nerveux. Pittoresque aussi.
Sa philosophie est pessimiste comme celle de La Rochefoucauld.
La Bruyère voit l'homme comme l'ont vu Pascal et Montaigne.
Quand il dénonce les misères de son temps, comme les abus de la noblesse, l'inégalité des conditions, la dureté des gens de finance, il annonce Voltaire et Beaumarchais.
Dans la querelle des Anciens et des Modernes, il prit parti pour les premiers.
Il vécut modestement, amoureux des livres et de la solitude.

Fénelon (François de Salignac de La Mothe-)
Prélat. Surnommé : le Cygne de Cambrai.
Traité de l'éducation des filles, Fables (en prose), Aventures de Télémaque, etc.
Comme précepteur du duc de Bourgogne, fils du Dauphin (donc petit-fils de Louis XIV), Fénelon se révéla plus pédagogue que Bossuet. Il sut en effet transformer son élève, impétueux, brutal et orgueilleux, en un être intelligent et franc.
En plusieurs points, il annonce Rousseau. De fait, des concepts d'éducation, jusque-là ignorés, sont mis en avant, comme l'introduction des leçons de choses. Nous dirions qu'il prône d'une certaine façon les méthodes actives.
C'est pour son élève qu'il écrivit les Fables, les Dialogues et Télémaque. Ce dernier ouvrage, plein de critiques indirectes contre la politique de Louis XIV, lui valut la disgrâce.
D'autre part, sa défense du quiétisme de Mme Guyon lui attire les foudres de Bossuet d'abord, du pape ensuite.
Privé de ses titres et pensions, il se retire dans son diocèse de Cambrai.

Jean-François Regnard
Enlevé par des corsaires, il vécut en captivité à Alger.
Ses deux œuvres principales, Le Jour et Le Légataire universel, connurent un vif succès.
Rappelle Molière par sa gaieté, sa verve, son sens du théâtre, sa langue aisée.

Fontenelle
Neveu des deux Corneille.
Cartésien.
Vulgarisateur de la science et notamment du système de Newton.
Fut en faveur des "Modernes".

Alain-René Lesage
Turcaret ou le Financier est une œuvre forte, digne de Molière.
Conteur alerte et vif.
Successeur de La Bruyère.

Saint-Simon (duc de)
Ses Mémoires font revivre la cour de Versailles, avec son atmosphère de commérages et d'intrigues.
Ami du Régent.
Quitta les mousquetaires, vexé de ne pas monter en grade.
Son style est singulièrement vivant.

Le XVIIIe siècle

Marivaux
Ruiné lors de la banqueroute de Law. Dut dès lors produire beaucoup pour vivre.
Compose en vingt ans une quarantaine de pièces de théâtre.
Ses comédies ont assuré sa renommée. Citons : la Surprise de l'amour, la Double inconstance, le Jeu de l'amour et du hasard, le Legs, les Fausses confidences, l'Épreuve.
Deux romans, qui sont des chefs-d'œuvre : la Vie de Marianne et le Paysan parvenu.

Montesquieu
Ses Lettres persanes peignent avec verve les ridicules et les vices.
L'Esprit des lois reste l'œuvre capitale de Montesquieu.
Les lois sont déterminées par divers éléments géographiques et historiques.
Le législateur doit adapter les lois aux circonstances.
Un système de lois bien adapté mène un peuple à la prospérité.
Il n'y a point de liberté si la puissance de juger n'est pas séparée des autres pouvoirs que sont le législatif et l'exécutif.
Fait l'éloge de la monarchie constitutionnelle de l'Angleterre.
Montesquieu annonce Voltaire.
La Sorbonne condamne l'Esprit des lois. Rome le censure.

Voltaire
Son œuvre est immense.
Citons :
Poèmes. La Henriade, le Désastre de Lisbonne.
Tragédies. Brutus, Zaïre, la mort de César.
Histoire. Le Siècle de Louis XIV.
Contes et romans. Zadig ou la Destinée, Micromégas, Candide ou l'Optimisme.
Philosophie. Lettres philosophiques ou Lettres sur les Anglais, Traité sur la tolérance, Dictionnaire philosophique.
Fit d'excellentes études chez les jésuites.
Vivacité précoce de son esprit.
Tendances au libertinage (ses mœurs étaient fort libres).
Ses vers satiriques le mènent à la Bastille.
Il exerça une véritable royauté intellectuelle sur toute l'Europe.
Son chef-d'œuvre : Candide.
Contrairement à Montesquieu, Voltaire vérifie ses sources, les témoignages recueillis. Son Siècle de Louis XIV lui prit vingt ans !
Voltaire a vivement attaqué Pascal.
Les œuvres philosophiques de Voltaire sont avant tout des œuvres de polémique religieuse. Il y proscrit tout dogme, tout culte matériel.

Buffon (comte de)              Histoire naturelle (36 vol.)            
Intendant du Jardin du roi (aujourd'hui, le Jardin des Plantes), il se consacra à son Histoire naturelle. Il y travailla cinquante ans.  
Observateur patient et minutieux, il a laissé de célèbres descriptions d'animaux.
La partie la plus solide de son œuvre : ses théories sur le système du monde.
Croyant et attaché à l'ordre établi.
Son influence fut grande.               
A su éviter le jargon technique.
Son style a des qualités remarquables de logique, de précision et de clarté.

Jean-Jacques Rousseau
Discours sur l'origine de l'inégalité, Julie ou la Nouvelle Héloïse, le contrat social, Émile, les Confessions, les Rêveries d'un promeneur solitaire.
Perdit sa mère en naissant et abandonné à dix ans par son père.
À seize ans, il se met à vagabonder à travers la Savoie. Puis en Suisse et dans le Midi.
Des personnes charitables le recueillent comme Mme de Warens et Mme d'Épinay.
Mais c'est chez le maréchal de Luxembourg à Montmorency qu'il écrit ses œuvres essentielles.
Il erre aussi en Angleterre où il finit par se brouiller avec le philosophe Hume.
Son mariage avec une servante d'auberge illettrée, Thérèse Levasseur, fut un fiasco. Car cette union équivoque gâta complètement sa vie.
Ses amis, les encyclopédistes, ne comprennent guère sa haine des conventions sociales, ses sautes d'humeur, ses manières brusques et rudes.
Son Discours sur le rétablissement des sciences et des arts le rend brusquement célèbre.
L'influence de Rousseau fut très grande : ses idées sociales étaient beaucoup plus audacieuses que celles de Voltaire et de Diderot.

Denis Diderot                             
Œuvres principales :
Romans. La Religieuse, le Neveu de Rameau, Jacques le Fataliste.
Théâtre. Le fils naturel.
Philosophie. Lettre sur les aveugles.
Il se voua tout entier pendant vingt ans à l'Encyclopédie.
Il en fut le directeur et l'animateur.
Travailleur acharné.
Il a passé sept mois près de l'impératrice de Russie, Catherine II.

Beaumarchais             Le Barbier de Séville, le Mariage de Figaro                       
Le Barbier de Séville est une farce amusante.
La verve de Beaumarchais est pittoresque et comique.
Mais la nouveauté, c'est le personnage de Figaro, coquin spirituel et audacieux, actif et insolent, qui traite d'égal à égal avec le grand seigneur qui l'emploie.
Le ton est plus audacieux encore dans le Mariage de Figaro.
La pièce - qui fut un triomphe - marqua nettement la déchéance de l'Ancien Régime.

Bernardin de Saint-Pierre
Disciple fidèle de J.- J. Rousseau.
Esprit chimérique. Mena une existence aventureuse.
Sous la Révolution, il fut nommé intendant du Jardin des Plantes et professeur de morale à l'École Normale.
Paul et Virginie le rendit riche et célèbre.

Condorcet (marquis de)
Son principal ouvrage :
Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain.
Lié au mathématicien d'Alembert, à Voltaire et à l'économiste Turgot.
Sa "mathématique sociale" est à l'origine de nos modernes statistiques.
Il collabora à l'Encyclopédie.
Son leitmotiv : croyance au progrès, matériel et moral.
Il fut poursuivi comme ami des Girondins.
Arrêté, il s'empoisonna.

André Chénier                             Bucoliques, Idylles, Iambes.
Naquit d'un père français et d'une mère grecque.
Plein d'enthousiasme pour la Révolution.
Mais il devint suspect en réprouvant les excès des Jacobins.
Mourut sur l'échafaud.
C'est le seul grand poète du XVIII e s. Le dernier des classiques.
"Sur des pensers nouveaux, faisons des vers antiques."
Chénier a su retrouver la beauté grecque.
Il s'apparente à Ronsard, à Racine, à Fénelon.
Annonce les Parnassiens.
L'art d'Homère et de Théocrite revit dans ses vers souples et chantants.
Les romantiques le choisirent comme ancêtre, avec Ronsard.
Les Iambes : un des chefs-d'œuvre de la satire politique.

Madame de Staël                Delphine, Corinne ou l'Italie, De l'Allemagne
Fille du banquier genevois Necker, ministre de Louis XVI.
Accueillit la Révolution avec enthousiasme, mais quitta Paris après les journées de Septembre (en 1792).
Elle ne cacha guère son hostilité contre Napoléon.
La chute de l'Empire lui permit de rentrer en France.
Le succès de Corinne lui valut une grande renommée.
Delphine et Corinne : des quasi-biographies.
Elle prépare la voie, avec Chateaubriand et après Rousseau, à la littérature lyrique.
Pour elle, la poésie du Nord (c'est-à-dire allemande) est romantique ;
celle du Midi, classique.
Brillante causeuse, elle aimait à remuer des idées neuves.

Le XIXe siècle

François René Chateaubriand (vicomte de)
Œuvres : Essai historique sur les révolutions, Génie du christianisme, contenant Atala et René, les Martyrs, Itinéraire de Paris à Jérusalem, les Natchez, Voyage en Amérique, Mémoires d'outre-tombe
Le vicomte de Chateaubriand eut une jeunesse rêveuse et morose, au château de Combourg, près de Saint-Malo.
Le fond de son âme, c'est l'orgueil, un orgueil démesuré et grandiose.
Nul n'a vécu davantage par le rêve et l'imagination.
Tout le romantisme est inclus dans son œuvre.
Il a su ressusciter les âges révolus avec leur atmosphère et leur pittoresque.
Tous les grands artistes du XIX e s., poètes, romanciers ou historiens (Hugo, Flaubert, Loti, Michelet ou Renan) relèvent plus ou moins de lui.

Jean-Louis Courier                       Pamphlets
Helléniste de grande valeur, il a laissé d'excellentes traductions d'ouvrages grecs.
Ses pamphlets sont des chefs-d'œuvre d'ironie habile et caustique.
Style d'une pureté toute classique.
Cet écrivain rappelle Voltaire.

Félicité Robert de La Mennais
Ses chefs-d'œuvre : Paroles d'un croyant et Le Livre du peuple.
Un Breton, comme Chateaubriand et, comme lui, un romantique, une âme exaltée.
Prêtre à trente-quatre ans.
Dans l'Essai sur l'indifférence, il attaque avec âpreté l'irréligion du XVIIIe s.
Il veut réconcilier l'Église et le monde moderne, et fonder la société sur la pure doctrine évangélique.
Ce catholicisme libéral fut adopté par des disciples enthousiastes, notamment Lacordaire et Montalembert. Avec eux, il fonde l'Avenir dont le pape condamne les idées.
Jusqu'à sa mort, il lutte pour la démocratie, exerçant une très grande influence.
Âme sincère et passionnée, Lamennais continua, en un sens, l'œuvre de Chateaubriand.

Henri Beyle, dit Stendhal
Œuvres : Rome, Naples et Florence, De l'Amour, Racine et Shakespeare, Armance ; surtout : Le Rouge et le Noir, La Chartreuse de Parme.
Servit sous Napoléon, dans l'intendance.
Il cache une sensibilité très vive sous la sécheresse ironique et précise de sa phrase.
Dans ses romans, nulle préoccupation de morale ni de style, mais des faits menus, précis, nombreux et des analyses psychologiques pleines de finesse et de vérité
Dans Le Rouge et le Noir et La Chartreuse de Parme, les deux héros sont des êtres amoraux, lucides, cyniques.
Ainsi Stendhal annonce le réalisme et même le naturalisme. Il annonce encore les romanciers psychologiques de la fin du XIXe s., comme Barrès et Proust.

Alphonse de Lamartine
Œuvres poétiques :
Méditations poétiques, Harmonies poétiques et religieuses, Jocelyn, la Chute d'un ange.
Œuvres en prose :
Histoire des Girondins, Confidences, Graziella, Cours familier de littérature.

Il trouve la révélation de son génie dans la Bible, Ossian, Rousseau, Chateaubriand, etc.
Les Méditations ont un succès triomphal, confirmé par les recueils suivants.
Lamartine était le poète que tous attendaient.
Il siège à la Chambre. Il y prononce d'importants discours : ce poète se révèle orateur précis et documenté. (Ses discours sont beaucoup plus solides que ceux de V. Hugo.)
En 1848, il est du gouvernement provisoire, puis ministre des Affaires étrangères.
Sa prodigalité de grand seigneur l'avait ruiné.
Pour vivre, il ne produisit que de la prose, de hâtifs travaux historiques ou critiques.
Lamartine n'est pas un poète de métier, mais sa facilité est celle du génie. Il produit des vers ailés qui s'envolent sans heurt.
Cette poésie est toute baignée de spiritualisme : elle tend vers le panthéisme.
L'ode de Lamartine est un chant sacré.

Alfred de Vigny (comte de)
Œuvres poétiques : Poèmes antiques et modernes, les Destinées.
Romans : Cinq-Mars, Stello, Servitude et Grandeur militaires.
Théâtre : Chatterton.
Chatterton fut un triomphe.
L'œuvre poétique d'Alfred de Vigny fut brève.
Vigny est plus un penseur qu'un artiste.
Il est supérieur à Lamartine et à Hugo par la puissance de sa pensée, mais il n'a pas leur imagination.
Du reste, il n'aime guère l'effusion directe, lyrique, de ses sentiments.
Il a préféré la forme symbolique.
Il annonce l'impassibilité parnassienne, hostile aux indiscrétions romantiques.
Sa philosophie est nettement pessimiste.

Jules Michelet                       
Précis d'histoire moderne, Histoire de France (12 vol.), Histoire de la Révolution française (7 vol.), etc.

Il se voue complètement à l'histoire de son pays.
Ardent démocrate.
Il refuse de prêter serment à l'empereur. Il se voit dès lors destitué de toutes ses charges.
Michelet est tout entier romantique par sa sensibilité et son imagination.
Il est poète autant que savant.
Il a aimé le peuple de France d'une profonde tendresse.
Il faut considérer les pages qu'il a consacrées aux Temps modernes (depuis la Renaissance) et à la Révolution, comme un beau poème lyrique à la gloire du peuple plutôt que comme une œuvre scientifique.
Michelet, fort partial, jette l'anathème aux rois, aux prêtres, aux nobles.
Michelet est un visionnaire.
Son histoire du Moyen-Âge reste son chef-d'œuvre.
Le style de Michelet est éloquent et passionné. Tantôt rythmé et musical, tantôt fiévreux et saccadé, il est le reflet même de ses sentiments.

Honoré de Balzac
Œuvres principales : La Peau de chagrin, le Colonel Chabert, Contes drolatiques, le Médecin de campagne, Eugénie Grandet, la Recherche de l'absolu, le Père Goriot, le Lys dans la vallée, la Cousine Bette, le Cousin Pons, etc.
L'œuvre de Balzac est la fresque de la France à la veille des Temps modernes.
Il s'attelle à une œuvre énorme, autant pour payer ses créanciers que par vocation.
Travaillant quatorze heures par jour, il publie en vingt ans une quarantaine de romans : la Comédie humaine.
Il n'échappe jamais aux embarras d'argent. Il meurt épuisé.
Tous les milieux, toutes les professions se trouvent dans son œuvre. C'est un très riche recueil de documents. Mais au point de vue littéraire, cette œuvre si touffue a des parties faibles. Style lourd et empâté, descriptions semblables à des inventaires, tirades interminables, intrigues touffues et parfois mélodramatiques.
Il a peint avec un relief vigoureux les bassesses et les petitesses de tous les milieux sociaux de son temps.
Balzac annonce le réalisme.

Henri Lacordaire              Conférences de Notre-Dame
Adhère aux idées de Lamennais, mais se soumet quand Rome les condamne.
Il restaure en France l'ordre des Frères Prêcheurs.
Il remporte de grands succès dans la chaire de Notre-Dame.
Le P. Lacordaire est le plus grand orateur religieux de l'époque.
La dialectique est moins sûre et moins étayée par le dogme que chez Bossuet.

Victor Hugo
Œuvres poétiques : Odes, les Orientales, les Feuilles d'automne, les Chants du crépuscule, les Voix intérieures, les Rayons et les Ombres, les Châtiments, les Contemplations, la Légende des siècles.
Œuvres en prose : Notre-Dame de Paris, les Misérables, les Travailleurs de la mer, l'Homme qui rit.
Théâtre : Cromwell, Hernani, Ruy Blas, les Burgraves.
Fils d'un général de l'Empire.
Ses premiers poèmes sont couronnés par l'Académie.
Ses Odes lui valent de Louis XVIII une pension.
Peu à peu, il évolue vers le romantisme : la préface de Cromwell fait de lui le chef de la nouvelle école. Il aborde cependant tous les genres et sa renommée grandit toujours. Mais l'échec des Burgraves qui marquait le déclin du romantisme et un deuil cruel (la mort de sa fille Léopoldine) l'écartent pour un temps de la littérature.
En 1851, lors du coup d'État, il se réfugie en Belgique, ensuite à Jersey, enfin à Guernesey. C'est à Hauteville-House qu'il compose ses œuvres les plus puissantes.
Sa popularité est immense ; il meurt en pleine gloire et Paris lui fait des funérailles triomphales.
Œuvre riche et diverse.
Hugo est servi par une imagination prodigieuse qui n'est vraiment à l'aise que dans le colossal et le sublime. Il ne sait être simple que lorsqu'il parle des enfants.
Sa sensibilité et ses idées sont simples, sans nuances, mais d'une rare puissance.
Il n'analyse rien, mais il fait vivre tout d'une vie surnaturelle.
Moins sensible que Musset et Lamartine, penseur moins ferme que Vigny, il les dépasse tous par la fougue et l'ampleur.
Le lyrisme de Hugo est servi par une richesse inégalée de vocabulaire, une variété inouïe de rythmes et un sens rare de la valeur musicale des mots.
Il a rénové la langue et le vers.
Son influence fut très grande : parnassiens et symbolistes lui doivent beaucoup.

George Sand
Œuvres principales : Indiana, Lélia, le Compagnon du tour de France, Consuelo, la Mare au diable, la Petite Fadette, François le Champi, Histoire de ma vie, Correspondance, etc.
Lucie-Aurore Dupin, orpheline de bonne heure, fut élevée dans le Berry, à Nohant, par sa grand-mère paternelle.
Sans fortune, elle vint à Paris avec ses deux enfants et essaya de gagner sa vie en composant des romans. Indiana lui valut la gloire littéraire.
Elle publie alors des romans fougueusement romantiques où elle exalte la passion, qu'elle met au-dessus des conventions sociales : c'est l'époque de sa liaison avec Alfred de Musset. Puis, elle se retire à Nohant, qu'elle ne quitte plus.
Elle s'avise alors de dire le charme de son cher Berry et elle publie des romans idylliques, où elle peint avec émotion les paysans et les paysages qu'elle aimait.
Ces romans, la Petite Fadette, la Mare au diable, les Maîtres sonneurs, etc. sont ses chefs-d'œuvre.

Charles Augustin Sainte-Beuve
Poésie : Vies, poésies et pensées de Joseph Delorme.
Roman : Volupté.
Critique : Histoire de Port-Royal, Causeries du lundi, etc.
Sainte-Beuve fait triompher la méthode historique.
Il se donna tout entier à la critique.
Il y apportait des dons remarquables : une intelligence très souple et très pénétrante.
Une curiosité avide de tous les problèmes, de toutes les œuvres, de toutes les époques.
Un goût sûr ; une documentation abondante.
Il a préféré les études particulières aux travaux d'ensemble.
Les Lundis sont une admirable collection de monographies.
Sainte-Beuve étudie les individus, sans chercher à établir des lois.
Recherche les "familles d'esprits". Dans cette entreprise, il a excellé.
Aucun dogmatisme. Mais il a laissé, quelquefois, influencer ses jugements par ses antipathies personnelles.
D'autre part, il ne comprend pas également toutes les formes d'art : il n'a pas senti l'importance de contemporains comme Baudelaire.

Gérard de Nerval
Traduction de Faust de Goethe.
Nouvelles : les Filles du feu, Aurélia.
Récit de voyage : Voyage en Orient.
Esprit curieux, avide du mystérieux et de l'étrange, alliant la fantaisie, voire la bizarrerie, à la profondeur et à la fraîcheur des sentiments et des impressions.
Fait connaître, par ses travaux, la poésie allemande.
Sa poésie annonce Baudelaire et les symbolistes.
Ayant souffert à plusieurs reprises de déséquilibre nerveux, il finit par sombrer dans la folie.

Alfred de Musset
Théâtre : les Caprices de Marianne, Fantasio, On ne badine pas avec l'amour, Lorenzaccio, le Chandelier, Il ne faut jurer de rien, Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée, etc.
Roman : la Confession d'un enfant du siècle.
L'enfant terrible du romantisme, a-t-on dit. En fait, un indépendant. Peut-être le plus sincère et le plus émouvant des poètes.
Très jeune, il fréquenta les cénacles romantiques, où son esprit fit merveille.
Il proclame son amour pour la Grèce antique et la tradition française de pureté et de mesure.
L'âme du poète : romanesque, libertinage, ironie sceptique, amoralisme, désir instinctif d'un amour pur et sincère, bonté délicate.
Ses vers, admirablement négligés, sont ailés et chantants, et parfois d'une force sublime.
Mais sa liaison malheureuse avec George Sand lui brise le cœur. Et cherche l'oubli dans l'ivresse. Il meurt jeune.
Toutes ses œuvres sont des confessions.
Prédominance totale de la sensibilité.
Nul poète n'est plus spontané : sa grâce, sa légèreté, sa finesse sont inégalables.
Et quand une émotion forte le saisit, nul n'est plus vigoureux.
Il est l'héritier de Marot, de Molière, de La Fontaine, de Marivaux.

Théophile Gautier
Poésie : Émaux et Camées
Romans : Mademoiselle de Maupin, le Capitaine Fracasse
Récit de voyage : Tra los montes
Critique : les Grotesques
Fut d'abord peintre. En fait, Gautier écrivain est resté peintre.
Il ramène la poésie à l'art pur.
Donc : peu ou pas de sentiments. Seul le souci de la beauté plastique l'intéresse.
Il a le culte exclusif de la forme : il excelle dans la description.
Sa doctrine de l'art pour l'art marque l'avènement d'une poésie plus impassible et plus réaliste.

Charles Baudelaire
Poésie : Fleurs du Mal
Prose : Petits poèmes en prose
Critique : Curiosités esthétiques, l'Art romantique
Vie malheureuse : il perdit son père à l'âge de six ans.
Il eut à souffrir du second mariage de sa mère .
Épuisé par une vie de désordre, il meurt à quarante-six ans.
Les cénacles le prennent pour modèle.
Baudelaire a renouvelé la poésie.
Comme Gautier, Baudelaire a le culte de la beauté plastique, dédaigneuse de toute morale.
L'œuvre est unique : elle fait un peu songer à Villon.
Ce poète, terriblement sincère et lucide, analyse l'homme comme Pascal.
Un des grands poètes du siècle.

Théodore de Banville
Poésie : Odes funambulesques, etc.
Dans son Petit traité de versification française, il ramène toute la poésie à la rime. Pour lui, le don essentiel, c'est la trouvaille immédiate de cet écho sonore.
Ressuscite les genres chers au XVe siècle : la ballade, le rondeau, le virelai, etc.
Banville se plaît, comme son ami Gautier, aux descriptions impersonnelles, sculpturales et colorées, d'un art impeccable.
Ce romantique attardé apparaît aussi comme un parnassien de la première heure.

Charles Leconte de Lisle              Poèmes antiques, Poèmes barbares
Passa sa jeunesse à l'île de la Réunion.
Ses œuvres l'imposèrent peu à peu comme chef de l'école parnassienne.
Fut nommé bibliothécaire du Sénat.
Remplaça Victor Hugo à l'Académie française.
Son œuvre, toute d'essence philosophique, est imprégné d'un pessimisme désespéré.

Gustave Flaubert
Œuvres : Madame Bovary, Salammbô, l'Éducation sentimentale, la Tentation de saint Antoine, Bouvard et Pécuchet (inachevé) ; Correspondance.
Se voua tout entier à la littérature.
Vécut le plus souvent dans sa maison à Croisset, près de Rouen.
Très bon et très idéaliste, il avait l'âme ardente et enthousiaste.
Il avait un grand dédain du "bourgeois" positif et mesquin.
Cela explique toute son œuvre.
Recherche de la forme parfaite.
Il travailla six ans à Madame Bovary.
D'où style complu, avec une joie parfois féroce, dans l'analyse des âmes médiocres ou vulgaires.
Salammbô, roman historique, connut un vif succès.

Edmond de Goncourt et Jules de Goncourt
Œuvres écrites en collaboration : Renée Mauperin, Madame Gervaisais.
Écrivains nerveux et impressionnables.
Ne s'intéressent qu'à la vie de leur temps dont ils s'efforcent de rendre toutes les nuances.
Ils ont créé le roman impressionniste et le style artiste.
Leurs œuvres sont assez mal composées.
Ils annoncent le naturalisme par leur intérêt pour les cas pathologiques et les milieux populaires et grossiers.
Leurs meilleurs romans, Sœur Philomène, Germinie Lacerteux et Renée Mauperin, mieux composés et plus sobrement écrits, sont des œuvres fortes, qui resteront.

Ernest Renan
Œuvres : L'Avenir de la science, les Origines du christianisme (dont Vie de Jésus), Souvenirs d'enfance et de jeunesse, etc.
Un Breton, comme Chateaubriand et Lamennais, préoccupé comme eux du divin.
Il se donne tout entier à l'étude des langues sémitiques et à l'exégèse sacrée.
Vie austère et laborieuse.
Ses travaux le rendent célèbre.
Au prix d'un labeur acharné, il put achever d'importants travaux historiques et philologiques.
De son éducation ecclésiastique, il avait gardé le goût - et le respect - des choses sacrées.
Il a le culte de la vie spirituelle, de la bonté morale et de la raison pure.
Son style est un enchantement.
Son influence fut très grande.

Alexandre Dumas père
Œuvres principales : les Trois Mousquetaires, Vingt Ans après, le Vicomte de Bragelonne, le Comte de Monte-Cristo, la Reine Margot, etc.
Fils du général Dumas.
Aidé par plusieurs collaborateurs, il signa trois cents ouvrages, drames et romans, et fut le plus populaire des écrivains de l'époque romantique.
Il dilapida les gains fabuleux qu'il avait amassés et mourut ruiné.
Avec Le Comte de Monte-Cristo, il connut un grand succès populaire qui n'allait plus se démentir.
A. Dumas est habile à camper des personnes inoubliables (aventuriers, bretteurs) entraînés dans des intrigues mouvementées par leur goût de l'action.
Style alerte.

Alexandre Dumas fils
Œuvres principales : la Dame aux camélias, le Demi-Monde, la Question d'argent, le Fils naturel, etc.
Il plaide avec ardeur contre les vices et les préjugés qui corrompent la famille et le mariage : égoïsme masculin, influence de l'argent, éducation mesquine, lois civiles défavorables à l'épouse, etc.

Hippolyte Taine
Œuvres : Essai sur les fables de La Fontaine, Essais de critique et d'histoire, Philosophes français du XIXe siècle, Histoire de la littérature anglaise, De l'intelligence, Origines de la France contemporaine, etc.
Fit de fortes études à l'École Normale supérieure.
Historien, philosophe.
Sa pensée et son œuvre sont d'une remarquable unité.
Disciple d'Auguste Comte.
Sa fameuse théorie de la race, du milieu et du moment.
Critique et philosophe, Taine est un maître écrivain, au style coloré, ferme et vivant.

Sully Prudhomme                  Les Solitudes
Ses poèmes philosophiques tombent parfois dans la froideur du vers didactique (les Solitudes, les Destins, le Bonheur).
René Prudhomme prit le nom de Sully, en souvenir de son père, dont c'était le nom familier.
Jeunesse assez triste.
Une ophtalmie incurable lui interdit la carrière scientifique.
Une vie consacrée à la poésie et à la méditation.
Ses premières œuvres sont de délicates analyses de l'âme humaine.

Alphonse Daudet
Romans : le Petit Chose, Lettres de mon moulin, Tartarin de Tarascon, Contes du lundi ; Fromont jeune et Risler aîné, Jack, le Nabab, Sapho, etc.
Théâtre : l'Arlésienne.
Sa famille étant ruinée, il dut se faire maître d'études.
Les Lettres de mon moulin assurèrent sa renommée.
La composition est nette et ses contes sont de pures merveilles.
Réalisme tout imprégné de poésie.
Rappelle l'œuvre de Dickens.

Émile Zola
Œuvres : les Rougon-Macquart, Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire (20 vol.), l'Assommoir, Nana, Au bonheur des dames, Germinal, la Faute de l'abbé Mouret, les Quatre Évangiles, le Roman expérimental, etc.
Sous l'influence des idées de Taine et de Claude Bernard, il entreprend des romans expérimentaux, à prétentions scientifiques.
L'Assommoir le rendit célèbre.
Zola est poète. Ses romans sont comme animés d'un souffle épique.
Il sait peindre avec force le grouillement des foules, l'âme d'une grande ville ou d'un quartier populaire, la vie collective d'une classe sociale.
Zola était épris de justice et de fraternité.
Il joua un rôle capital dans le déroulement de la fameuse affaire Dreyfus et le combat courageux qu'il mena pour faire reconnaître l'innocence de l'officier faussement accusé de trahison.
Le style de Zola est vigoureux et coloré, mais parfois lourd et monotone.

Jose Maria de Heredia               Les Trophées
Avait du sang français par sa mère, du sang espagnol par son père, qui descendait des conquistadors du XVIe siècle.
Ses sonnets, qu'il travaillait avec un soin extrême, assurèrent sa renommée.
C'est le triomphe de l'art pur.
La forme (coloris, rythme, sonorité) est parfaite.

Guy de Maupassant
Romans et contes : Boule-de-Suif, la maison Tellier, une vie, Bel-Ami, le rosier de Mme Husson, etc.
Travailla sous la direction de Flaubert.
Boule-de-Suif assure sa réputation de conteur.
Dès lors, sa production est abondante.
Elle fut cependant de courte durée. Atteint d'une maladie nerveuse, Maupassant sombre dans la folie. Il meurt peu après.
Maupassant décrit la vie telle qu'il la voit, brutale et mesquine.
L'art de Maupassant est sobre et vigoureux : style très pur et composition nette et concentrée.

Paul Verlaine
Œuvres : Poèmes saturniens, Fêtes galantes, la bonne Chanson, Romances sans paroles, Sagesse, Jadis et naguère.
Prose : les Poètes maudits.
Il rencontre Arthur Rimbaud et voyage avec lui en Angleterre, puis en Belgique. Cette liaison, troublée par mainte scène orageuse, finit tragiquement : Verlaine blesse son ami d'un coup de revolver.
Finalement, il revient échouer à Paris, où il achève de vivre misérablement, se traînant d'hôpital en hôpital. Mais il est désormais célèbre : la jeune école salue en lui un maître.
Verlaine fut d'abord parnassien.
Il prendra sa place, comme Baudelaire, parmi les grands poètes lyriques.

Anatole France (Anatole François Thibault, dit)
Romans et contes : le Crime de Sylvestre Bonnard, la Rôtisserie de la reine Pédauque, le Lys rouge, Les dieux ont soif, etc.
Son père, libraire, était connu sous le pseudonyme de "France" (abréviation de François, commune en Anjou).
Anatole France grandit donc au milieu des livres.
Il fut toujours un acharné "bouquineur".
La vaste érudition, philosophique et littéraire, dont son œuvre témoigne, est le fruit de longues études.
Il débute par un chef-d'œuvre, le Crime de Sylvestre Bonnard.
Anatole France est plus un philosophe qu'un romancier.
La saveur de son œuvre est dans la pensée philosophique.
Cette philosophie est le scepticisme de Rabelais et de Voltaire, d'une ironie amusée, corrigée par une profonde pitié pour la misère humaine.
Son œuvre est la fleur du génie gréco-latin : en plein symbolisme, son style est d'une pureté, d'une clarté et d'une harmonie inégalées, semble-t-il.

Pierre Loti (Julien Viaud, dit)
Romans et contes : le Mariage de Loti, Mon frère Yves, Pêcheur d'Islande, Madame Chrysanthème, Ramuntcho, etc.
Officier de marine, il promena par le monde une âme inquiète et mélancolique.
Nature primitive, mais nerveuse, plus sensible qu'intelligente.
Il ne s'intéresse qu'aux humbles, aux simples, aux mirages de la nature, aux splendeurs des âges évanouis.
Ses romans, très tristes, sont faits de souvenirs, de rêveries personnelles, incorporés dans une action assez lâche, qui ne varie guère : il s'agit toujours de la séparation douloureuse de deux êtres qui s'aiment.
L'œuvre de Loti est poétique avant tout.

Jules Lemaitre                Les Contemporains, Impressions de théâtre
Parmi les critiques de l'époque, Jules Lemaitre est celui qui rappelle le plus Sainte-
Beuve.
J. Lemaitre est surtout un psychologue.
Rien de plus pénétrant que ses études sur Racine, Molière, Lamartine, les Goncourt, Daudet, etc.

Arthur Rimbaud             Une saison en enfer, etc.
Vie orageuse.
Atteint d'une tumeur au genou, il vint mourir à l'hôpital de Marseille.
À seize ans, il compose des poèmes qui révèlent un génie d'une étrange précocité : le Bal des pendus, le Bateau ivre.
L'œuvre de Rimbaud : écrite entièrement pendant la jeunesse du poète (vers sa dix-septième année).
Son art, tour à tour impétueux et délicat, en rupture délibérée avec la tradition, a exercé une influence notable sur maints poètes de la fin du XIXe et du XXe siècle.
Les surréalistes l'ont revendiqué comme leur précurseur.

Maurice Barrès
Œuvres : Du sang, de la volupté et de la mort, la Colline inspirée, etc.
Ce dilettante en vint à s'occuper de politique et défendit toutes les idées traditionnelles, même religieuses, quoiqu'il fût peu croyant.
C'est un maître écrivain, un grand publiciste, au style harmonieux et plein, parfois un peu tendu.

Henri de Régnier
Œuvres : Poèmes anciens et romanesques, les Jeux rustiques et divins, les Médailles d'argile, la Cité des eaux, etc.
Symboliste à ses débuts, il évolua peu à peu vers une poésie plus classique.
Artiste pur et probe, épris de beauté, ses vers souples et harmonieux sont d'un dessin très sûr.
La perfection de sa forme s'allie à la subtilité délicate du sentiment.

Le XXe siècle

Jules Renard
Œuvres : l'Écornifleur, Poil de Carotte, Histoires naturelles, etc.
Il humanise les bêtes et animalise les humains.
Poil de Carotte : le type de l'enfant opprimé.
Ces tableaux menus et sobres sont des chefs-d'œuvre de réalisme.
L'observation aiguë est servie par un style incisif et raffiné, mais d'une pureté toute classique.

Romain Rolland
Romans : Jean-Christophe (10 vol.).
Il a aussi écrit des ouvrages d'histoire et de politique.
Romain Rolland, musicologue et critique averti, est surtout connu par la série de romans intitulée Jean-Christophe.
C'est l'histoire de la vie ardente d'un compositeur allemand, Jean-Christophe Kraft, qui s'est donné tout entier à l'Art pour servir l'humanité.
Romain Rolland est un maître écrivain, au style vigoureux et parfois lyrique.

Paul Claudel
Poésie : Cinq Grandes Odes.
Théâtre : Tête d'or, l'Otage, l'Annonce faite à Marie, le Soulier de satin.
Appartint au corps diplomatique.
Poète chrétien.
Style biblique, parfois obscur.
Créateur puissant d'images et de rythmes.

Francis Jammes
Poésie : les Géorgiques chrétiennes, etc.
Romans : Clara d'Ellébeuse, etc.
Ses œuvres marquent un retour de la littérature vers la religion.
Aucun souci des règles traditionnelles de style ou de métrique.
Ce poète a l'âme bucolique.

Edmond Rostand
Théâtre : Cyrano de Bergerac, l'Aiglon, etc.
C'est par son théâtre en vers que Rostand atteignit la renommée.
Cyrano de Bergerac fut un succès triomphal.
Les pièces de Rostand sont, tout compte fait, les chefs-d' œuvre du théâtre romantique. On y retrouve le lyrisme héroïque de Hugo et la fantaisie burlesque de Scarron. (Paul Scarron [1610-1660] fut le prince du burlesque. Malgré ses infirmités [il était paralytique], il recevait chez lui une société brillante. Il épousa en 1652 une jeune orpheline, Françoise d'Aubigné [petite-fille du grand poète protestant], qui deviendra plus tard Mme de Maintenon.)
L'inspiration en est noble, toute pénétrée d'idéalisme.

André Gide
Essais et romans : les Nourritures terrestres, l'Immoraliste, les Caves du Vatican, la Symphonie pastorale, les Faux-Monnayeurs, etc.
De famille protestante.
Peu connu avant 1914, sauf d'une élite.
Il prêcha d'abord la libération intellectuelle et l'individualisme (comme Barrès).
Puis, par une évolution curieuse, cet individualisme l'a amené à des idées fort avancées : par exemple, grand mépris des opinions conformistes.
Le style est musical et mobile, classique pourtant, malgré l'influence symboliste.
Il obtient le Prix Nobel de littérature en 1947.

Paul Valéry
Poésie : la Jeune Parque, Charmes, etc.
Prose : la Soirée avec M. Teste, Variété.
Disciple de Mallarmé.
Ses premiers poèmes (Album de Vers anciens) manifestent l'influence du Symbolisme et de S. Mallarmé.
La Jeune Parque attira sur lui l'attention des lettrés.
Comme Mallarmé, P. Valéry n'écrit que pour une élite.
Il délaissa de plus en plus la poésie pour l'essai philosophique ou critique.
Son influence fut considérable.

Marcel Proust
Œuvres : À la recherche du temps perdu.
Ce roman se compose de sept parties :
- Du côté de chez Swann,
- À l'ombre des jeune filles en fleurs,
- le Côté de Guermantes,
- Sodome et Gomorrhe,
- la Prisonnière,
- la Fugitive ou Albertine disparue,
- le Temps retrouvé.

Fréquenta avec passion les milieux aristocratiques dont il aimait le spectacle chatoyant.
Atteint d'une maladie incurable, il se retira dès 1903 de la vie active et entreprit, avec une hâte fiévreuse, dans la solitude de sa chambre, la rédaction d'un vaste roman.
La phrase de Proust : extrêmement longue et sinueuse, complexe et ramifiée.
Marcel Proust est un psychologue subtil.
À la recherche du temps perdu est une œuvre très neuve et très riche.

Paul Fort                Ballades françaises (26 vol.)
Inventeur de la prose rythmique, qui réduit la prosodie au seul agrément du rythme, et parfois de l'assonance.
P. Fort est un poète abondant et généreux.

Colette
Œuvres : Claudine à l'école, Claudine à Paris, Claudine s'en va, la Vagabonde, Sido, le Blé en herbe, etc.
Un des écrivains français contemporains les plus doués.
Un art très sûr et très subtil, un sens inné des ressources de la langue, mis au service d'une psychologie aiguë et d'une sensibilité vive et délicate.
Description charnelle des choses et des paysages bourguignons.
Sa prose, souple, nerveuse, insinuante, est celle d'un artiste.

Charles Péguy
Œuvres : Jeanne d'Arc, Mystères (le Mystère de la charité de Jeanne d'Arc), Ève, Notre jeunesse, l'Argent, etc.
Âme mystique, il s'est fait l'apôtre d'une sorte de socialisme chrétien.
Fondateur en 1900 des Cahiers de la quinzaine dont l'influence fut grande.
Style souvent rude et torturé.
Sa vie, brève et pleine, fut couronnée par une mort héroïque : il fut tué, en 1914, sur le front de Champagne. Comme Guillaume Apollinaire et Alain-Fournier.

Guillaume Apollinaire
Poésie : Alcools, Calligrammes.
Romans : le Poète assassiné, etc.
Né de parents polonais.
Son influence fut grande dans tous les milieux de jeunes artistes.
L'œuvre d'Apollinaire achève le symbolisme et contient en germe toutes les audaces de la poésie et de l'art modernes.
C'est lui qui emploie d'abord le nom de Surréalisme.
Son inspiration est humaine et fraternelle.
Ce rêveur est aussi un humoriste.
Se plaît aux pires extravagances, désarticulant poème, strophe, vers et phrase.
Une sensibilité très émouvante.
Fit toute la guerre : blessé à la tête, près de Berry-au-Bac (Aisne).
Trépané, il mourut à Paris le 9 novembre 1918.

Jean Giraudoux
Romans et nouvelles : Suzanne et le Pacifique, Siegfried et le Limousin, Bella, etc.
Théâtre : Siegfried, Amphitryon, Intermezzo, La guerre de Troie n'aura pas lieu, Électre, Ondine, la Folle de Chaillot, etc.
Prosateur ingénieux et original.
Son style : très brillant, très imagé, fertile en trouvailles imprévues.
Son théâtre a connu un vif succès.

Georges Duhamel                  Chronique des Pasquier (10 vol.), etc.
La Vie des martyrs et Civilisation - livres admirables par leur généreuse pitié - content ses souvenirs des hôpitaux de front.
Ses œuvres valent par la sympathie et l'ironie souriante avec lesquelles il contemple les hommes.
Duhamel enseigne le goût de la vie, l'optimisme serein, l'amour de l'activité spirituelle, la sincérité de cœur et d'esprit.

Jules Supervielle
Poésie : Débarcadères, Gravitations, etc.
Romans : l'Enfant de la haute mer, etc.
Théâtre : la Belle au bois, etc.
Supervielle garde le souvenir de l'Amérique du Sud et le goût du voyage et du dépaysement. Sa poésie leur empruntera fréquemment prétextes et symboles.
Son art n'est rien moins qu'exotique.
Sa poésie a parfois été rattachée au mouvement surréaliste dont elle serait sans doute une des plus authentiques réussites.
Fraîcheur et ton pénétrant de certains de ses poèmes.
Le mystère quotidien s'exprime par les mots les plus simples et les images les plus claires.
Incontestablement, Supervielle est un des artistes qui a le mieux réussi dans la recherche de moyens poétiques nouveaux.

André Maurois
Romans : les Silences du colonel Bramble, Climats.
Biographies romancées : Ariel ou la Vie de Shelley, etc.
Écrivain très érudit qui rappelle Anatole France par la finesse délicate de son art, sa philosophie sereine - un peu sceptique - et son atticisme.
Il a romancé ses souvenirs de guerre dans Les Silences du colonel Bramble.
Il a contribué à faire aimer en France le génie anglais.

François Mauriac
Romans : Génétrix, Thérèse Desqueyroux, le Nœud de vipères, etc.
Théâtre : Asmodée, les Mal-Aimés.
Mauriac continue la grande tradition du roman français depuis La Princesse de Clèves.
Il est vraiment classique dans ses analyses de caractères.
D'inspiration chrétienne, ces romans montrent toujours (comme les tragédies de Racine) l'âpre conflit des passions dans les âmes misérables.
Membre de l'Académie française.
Prix Nobel de littérature en 1952.

Jules Romains
Ce pseudonyme littéraire est devenu ensuite le nom légal de Louis Farigoule.
Initiateur de l'unanimisme.
Ce mouvement voulait régénérer la poésie.
J. Romains est un écrivain très sincère et très probe.
La Vie unanime (poème), Knock (pièce de théâtre), Les Copains (roman) valent tous par l'impitoyable lucidité avec laquelle il analyse et révèle les âmes et les mœurs. Mais son chef-d'œuvre est sans doute Les Hommes de bonne volonté, énorme roman (27 vol.) qui a l'ampleur et la puissance de l'œuvre de Balzac.

Henry de Montherlant
Romans : les Bestiaires, les Célibataires, les Jeunes Filles.
Théâtre : la Reine morte, le Maître de Santiago, Port-Royal.
Une certaine unité se dégage des aspects divers, contradictoires même, de son œuvre : c'est la recherche d'une éthique qui donnerait à la vie un sens ou, plutôt, une valeur.
Il exalte la liberté, une certaine forme d'honneur, les qualités viriles.
Langue ferme, expressive, colorée et pure.
Mépris des ornements et des grâces factices.
Aisance et sobriété.

André Malraux
Romans : la Voie royale, la Condition humaine, l'Espoir, etc.
Malraux, après des études d'orientaliste, part pour l'Indochine où il est chargé d'une mission archéologique.
La Condition humaine obtient le prix Goncourt en 1933.
Après avoir joué un certain rôle en politique, il se consacre à la philosophie de l'art (Les Voix du Silence, Le Musée imaginaire de la Sculpture, etc.).
L'exaltation d'une volonté farouche : voilà ce que les personnages cherchent en elle. Une solution au grand problème qui les hante : donner un sens à leur vie. Et, par là, échapper au désespoir d'un destin vide et absurde.
Malraux annonce tout un courant de littérature romanesque et dramatique qui pose en termes angoissés ce même problème de la personne humaine et de son destin (Sartre, Camus).

Jean-Paul Sartre
Œuvres principales :
Philosophie et essais : l'Être et le Néant, les Mots, etc.
Romans et nouvelles : la Nausée, le Mur, les Chemins de la liberté.
Théâtre : Huis clos, les Mains sales, le Diable et le Bon Dieu, etc.
Né d'une famille bourgeoise.
Agrégé de philosophie.
Professeur de philosophie dans plusieurs lycées. Notamment au lycée Condorcet.
Après la guerre, il fonda une revue : Les Temps modernes.
Fait de nombreux voyages : aux États-Unis, en Afrique, en Russie.
Sartre est le principal représentant en France de l'existentialisme. Selon cette doctrine philosophique, l'homme n'est pas déterminé d'avance par son essence, mais est libre et responsable de son existence.
Sartre a été marqué par la phénoménologie et par le philosophe allemand Heidegger qui se réclamait de cette doctrine.
(La phénoménologie vise à fonder la philosophie comme science rigoureuse. Elle fut développée par Husserl, un philosophe allemand, dont Heidegger fut l'élève.)
Sartre est un philosophe avant tout.
Il sut donner une forme littéraire et vivante à des problèmes et à des drames essentiellement idéologiques (La Nausée, Le Mur, Huis clos).
Sartre a subi, comme maints autres écrivains, l'influence d'une époque sombre et dure, marquée par la guerre, la Résistance, les inquiétudes sociales.
Son œuvre a profondément influencé notre temps.
Sartre refusa, en 1964, le Prix Nobel de littérature.
Sartre ne laisse pas indifférent. Tantôt adulé, tantôt haï, il s'est affiché comme un pro-communiste pur et dur et, par conséquent, comme un défenseur inconditionnel du goulag.
Le général de Gaulle l'a comparé à Voltaire.

Albert Camus
Œuvres principales :
Romans : l'Étranger, la Peste, la Chute.
Théâtre : Caligula, les Justes, etc.
Essais : Noces, le Mythe de Sisyphe, etc.
Né dans un milieu modeste.
Licencié ès lettres.
Exerce différents métiers.
Acteur, puis journaliste, il est à Paris en 1940 pendant l'Occupation allemande.
Il se mêle activement au mouvement de la Résistance.
Sa langue, lyrique au début (Noces), puis volontairement dépouillée et presque sèche, excelle dans la notation directe, objective ; on pense au journaliste que fut Camus.
Dans sa retenue et sa sobriété, cet art réussit à évoquer les émotions les plus poignantes avec une intensité dramatique.
Albert Camus reçut, en 1957, le prix Nobel de littérature.
 

(Source : Jacques GOB, Pages classiques, De Boeck.)

Morceaux choisis.

Sonnet pour Hélène.

Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise auprès du feu, devidant et filant,
Direz, chantant mes vers, et vous esmerveillant :
"Ronsard me celebroit du temps que j'estois belle."

Lors, vous n'aurez servante oyant telle nouvelle,
Desja sous le labeur à demy sommeillant,
Qui, au bruit de Ronsard, ne s'aille reveillant,
Benissant vostre nom de louange immortelle.

Je seray sous la terre, et, fantosme sans os,
Par les ombres myrteux je prendray mon repos;
Vous serez au fooyer une vieille accroupie,

Regrettant mon amour et vostre fier desdain.
Vivez, si m'en croyez, n'attendez à demain;
Cueillez dès aujourd'huy les roses de la vie.

(Pierre de Ronsard,  Sonnets pour Hélène.)

Sonnet.

Heureux qui, comme Ulysse, a faict un beau voyage,
Ou comme cestuy la qui conquit la toison,
Et puis est retourné, plein d'usage et raison,
Vivre entre ses parents le reste de son aage!

Quand revoiray je, helas! de mon petit village
Fumer la cheminee, et en quelle saison
Revoiray je le clos de ma pauvre maison,
Qui m'est une province, et beaucoup d'avantage?

Plus me plaist le sejour qu'ont basty mes ayeulx,
Que des palais Romains le front audacieux,
Plus que le marbre dur me plaist l'ardoise fine;

Plus mon Loyre gaulois que le Tybre latin,
Plus mon petit Lyré que le mont Palatin,
Et, plus que l'air marin, la doulceur angevine.

(Joachim du Bellay, Regrets.)

Saison des semailles, le soir.

C'est le moment crépusculaire.
J'admire, assis sous un portail,
Ce reste de jour dont s'éclaire
La dernière heure du travail.

Dans les terres, de nuit baignées,
Je contemple, ému, les haillons
D'un vieillard qui jette à poignées
La moisson future aux sillons.

Sa haute silhouette noire
Domine les profonds labours.
On sent à quel point il doit croire
À la fuite utile des jours.

Il marche dans la plaine immense,
Va, vient, jette la graine au loin,
Rouvre sa main, et recommence.
Et je médite, obscur témoin,

Pendant que, déployant ses voiles,
L'ombre, où se mêle une rumeur,
Semble élargir jusqu'aux étoiles
Le geste auguste du semeur.

(Victor Hugo, Chansons des Rues et des Bois.)

L'Albatros.

Souvent, pour s'amuser, les hommes d'équipage
Prennent des albatros, vastes oiseaux des mers,
Qui suivent, indolents compagnons de voyage,
Le navire glissant sur les gouffres amers.

À peine les ont-ils déposés sur les planches,
Que ces rois de l'azur, maladroits et honteux,
Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
Comme des avirons traîner à côté d'eux.

Ce voyageur ailé, comme il est gauche et veule !
Lui, naguère si beau, qu'il est comique et laid !
L'un agace son bec avec un brûle-gueule,
L'autre mime, en boitant, l'infirme qui volait !

Le Poète est semblable au prince des nuées
Qui hante la tempête et se rit de l'archer ;
Exilé sur le sol au milieu des huées,
Ses ailes de géant l'empêchent de marcher.

(Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal.)

Les Yeux.

Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Des yeux sans nombre ont vu l'aurore;
Ils dorment au fond des tombeaux
Et le soleil se lève encore.

Les nuits plus douces que les jours
Ont enchanté des yeux sans nombre;
Les étoiles brillent toujours
Et les yeux se sont remplis d'ombre.

Oh! qu'ils aient perdu le regard,
Non, non, cela n'est pas possible!
Ils se sont tournés quelque part
Vers ce qu'on nomme l'invisible;

Et comme les astres penchants
Nous quittent, mais au ciel demeurent,
Les prunelles ont leurs couchants,
Mais il n'est pas vrai qu'elles meurent :

Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Ouverts à quelque immense aurore,
De l'autre côté des tombeaux
Les yeux qu'on ferme voient encore.

(Sully-Prudhomme, Stances et Poèmes.)

Les Conquérants.

Comme un vol de gerfauts hors du charnier natal,
Fatigués de porter leurs misères hautaines,
De Palos de Moguer, routiers et capitaines
Partaient, ivres d'un rêve héroïque et brutal.

Ils allaient conquérir le fabuleux métal
Que Cipango mûrit dans ses mines lointaines,
Et les vents alizés inclinaient leurs antennes
Aux bords mystérieux du monde occidental.

Chaque soir, espérant des lendemains épiques,
L'azur phosphorescent de la mer des Tropiques
Enchantait leur sommeil d'un mirage doré;

Ou penchés à l'avant des blanches caravelles,
Ils regardaient monter en un ciel ignoré
Du fond de l'Océan des étoiles nouvelles.

(José-Maria de Heredia, Les Trophées.)

Qui a écrit cette strophe merveilleuse ?

Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages,
Dans la nuit éternelle emportés sans retour,
Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges
Jeter l'ancre un seul jour ?

Et cet autre quatrain ?

Mon cœur, lassé de tout, même de l'espérance,
N'ira plus de ses vœux importuner le sort;
Prêtez-moi seulement, vallon de mon enfance,
Un asile d'un jour pour attendre la mort.

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